Dominique Cravic et les Primitifs du futur

« On les surnomme les Primdufs. Ni Schtroumpfs ni Peuple des Cavernes, juste un joyeux collectif de musiciens qui n’ont pas les instruments dans leurs poches. Et qui vouent une passion irraisonnée à un genre musical qu’on pourrait croire obsolète, caduque et antédiluvien : la valse musette. Mais attention, rien à voir avec les flonflons égrillards des bals popus de sous-préfectures en goguette, pas plus qu’avec les trilles à papa des Horner et autres Verchuren de thés dansants. Non, là on parle du bal musette pas pour les mauviettes, du vrai, du viril, de l’authentique, de l’athlétique, qui faisait jadis guincher apaches et gisquettes sur les fortifs de Paname. A lire comme ça, on pourrait croire que les Primitifs du Futur, car c’est leur nom, s’amusent à minutieusement recréer façon musée poussiéreux les effluves festives d’antan. Pas que. Car si nos bons sauvages aiment à batifoler dans les années vingt parisiennes, ils ne répugnent pas à se frotter aux rythmes de la planète, rumba zaïroise ou jazz manouche, valse hindoue ou tango argentin, blues, paso doble ou chanson réaliste. L’histoire commence en 1986, lorsque Dominique Cravic, champion du ukukéké et guitariste émérite qui a fait ses gammes avec des jazzmen comme Lee Konitz ou Larry Coryell et a accompagné, entre autres, Georges Moustaki et Henri Salvador, rencontre le dénommé Robert Crumb. Oui, le légendaire auteur de bandes dessinées qui fit les beaux jours de la culture underground psychédélique des seventies yankees, le papa de Fritz le Cat et de Mr Natural en personne, le créateur aussi de la pochette du ‘’Cheap Thrills’’ de Janis Joplin. Crumb joue du banjo et de la mandoline, collectionne les 78 tours de blues, de jazz et de… musette. Les deux compères inventent aussitôt un orchestre au diapason, en compagnie de nombreuses pointures comme l’accordéoniste Daniel Colin, le clarinettiste Bertrand Auger, le saxophoniste Daniel Huck, le contrebassiste Jean-Philippe Viret ou la chanteuse Claire Elzière (sorry, impossible de les citer tous). Tout ce beau monde a enregistré quatre albums depuis 1986 (aux pochettes dessinées par Crumb), dont certains avec la participation d’invités comme Pierre Barouh, Jean-Jacques Milteau, Allain Leprest, Sanseverino ou Olivia Ruiz. Depuis trois décennies, les Primitifs du Futur portent la bonne parole du musette aux quatre coins du monde, de fiestas en festivals, et publient aujourd’hui un double vinyle, intitulé Résumé des épisodes précédents et rassemblant le meilleur de leurs aventures. Un cocktail rafraîchissant et ragaillardissant de ‘’world tribal musette’’, comme ils disent, qui, par ces temps électro-numériques, fait l’effet d’une véritable cure de jouvence, une potion swing aux effets magiques. Les Primitifs du Futur ou le retour en avant ».

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